En 1996, une forme spécifique de la maladie de Parkinson a été détectée en Guadeloupe.
« Nous connaissons la
maladie avec ses signes classiques, lenteur, tremblements, raideurs. La
forme atypique de la maladie est plus sévère et plus compliquée. » Le
professeur Annie Lannuzel dirige le service de neurologie au CHU de
Pointe-à-Pitre. Elle est rattachée à une unité de recherche à l'Institut
du cerveau et de la moelle épinière de la Salpêtrière, spécialisée dans
la maladie de Parkinson et créée par le Professeur Yves Agid, fondateur
de Parkinson France. « Les patients répondent moins bien aux
traitements. D'autres symptômes se rajoutent aux autres comme les
troubles de l'équilibre (provoquant des chutes brutales et
incontrôlées), mais aussi des hallucinations » . La moitié des patients
sont atteints de paralysie du regard et de dysautonomie (chute de
tension lorsque l'on se lève), ce qui rend cette forme de maladie très
invalidante.
«
Nous avons établi deux photographies simultanées sur deux ans en
Guadeloupe, en Martinique et avons obtenu strictement le même chiffre de
Parkinson standard et atypique sur les deux îles. Depuis 2018, nous
parlons de Parkinson caribéen. Une étude en Guyane est en cours » ,
poursuit le Dr Lannuzel.
Dans
les formes classiques de la maladie de Parkinson durant les dix
premières années, la médecine arrive à diminuer de moitié, voire
totalement, les symptômes moteurs (lenteur, raideurs et tremblements).
Chez les personnes touchées par le Parkinson caribéen, l'amélioration de
ces signes moteurs est de l'ordre de 30% en moyenne.
Le Pr Lannuzel a cherché à comprendre pourquoi et comment
ces formes sévères s'étaient développées de manière identique sur ces
deux îles.
« Dès
1996, nous nous sommes focalisés sur six patients atteints du Parkinson
caribéen. L'un d'eux avait l'habitude de boire de grandes quantités de
tisanes à base de corossol, pour se calmer. Ce fruit a des vertus
anxiolytiques et sédatives. On lui a demandé d'arrêter d'en consommer.
Sa santé s'est considérablement améliorée. Il a pu remarcher et
reprendre son activité professionnelle, ce qui était inenvisageable, au
départ. »
Le Pr
Lannuzel a alors cherché à savoir si il y avait dans ce fruit une
substance capable d'agir sur les neurones qui dégénèrent avec Parkinson.
« Il existe dans le corossol une substance, l'annonacine, qui est
capable comme certains pesticides, de bloquer la respiration des
neurones. Des souris qui consommaient quotidiennement, durant un an, de
l'annonacine, développaient les mêmes lésions cérébrales que dans la
maladie. » En comparant la consommation de corossol des patients
atteints d'un Parkinson caribéen à celle des parkinsoniens classiques ou
des non-malades (du même âge), ils ont observé que tous les forts
consommateurs avaient une forme atypique. « Nous avons conclu que la
consommation d'un fruit par jour pendant dix ans constitue un risque
pour la santé."
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